Historique de la SPPQ et commémoration du centenaire

Par Gilles Émond, Ph.D., agronome Président du Comité du Centenaire de la SPPQ

Le 19 novembre 2008 se tenait, au Musée National des Beaux-arts du Québec, la journée sur la Commémoration du Centenaire de la Société de protection des plantes du Québec. Fondée le 24 juin 1908 au Collège Macdonald de l’Université McGill, elle est la plus ancienne société scientifique consacrée à toutes les disciplines de la protection des plantes au monde et a exercé depuis 100 ans, un leadership majeur dans ce domaine au Québec.

Historique

Le 24 juin 2008 marquait le 100e anniversaire de la Société de protection des plantes du Québec (SPPQ), société née dans ce qui était alors la principale salle de cours du bâtiment de biologie du Collège MacDonald de l’Université McGill, et qui se distingue comme la plus ancienne société de l’hémisphère occidentale vouée à la protection des plantes et toujours active sous son nom original. Sa principale concurrente pour cet honneur est l’American Phytopathological Society (APS) qui a été également fondée en 1908, mais seulement en décembre de cette année là, soit près de six mois après la SPPQ. Cependant, cette Société ne traite que des maladies des plantes.

Lorsque la SPPQ publiait ses rapports annuels, en français et en anglais, très peu d’organisations au Canada publiaient des renseignements utiles en français sur la régie et la gestion des cultures. Pendant plusieurs années, les rapports de la SPPQ ont servi de manuels dans les écoles et les collèges d’agriculture, en raison de la présence de nombreux articles illustrés sur les maladies végétales, les insectes ravageurs et d’autres problèmes liés à la protection des plantes. La grande qualité et l’utilité de ces rapports étaient largement reconnues. À vrai dire, les premières publications de la SPPQ étaient des promoteurs ou précurseurs des bulletins modernes sur la protection des plantes parrainés par les gouvernements.

Pendant un certain nombre d’années après l’incendie de l’atelier d’imprimerie de la Société en 1910, la publication de ses rapports annuels était financée par le gouvernement du Québec. Ils étaient considérés comme une partie du rapport annuel du ministère de l’Agriculture et « imprimés par ordre de la Législature ». Le septième rapport annuel, celui de 1914 1915, était appelé « Supplement to the Department of Agriculture ». Le gouvernement du Québec apporte encore une aide financière généreuse pour éponger le coût des publications de la SPPQ.

Lorsque le professeur William Lochhead, l’homme qui a conçu cette Société bilingue vouée à la science, a tenu la première réunion de son organisation, seuls 15 hommes y assistaient. Il s’agissait entre autres : du révérend Dr Robert Campbell,mycologue et M. A.F. Winn, de Montréal; du révérend George Ducharme, de Rigaud; du révérend Dr Thomas Fyles, entomologiste bien connu, de Lévis; du Dr W. Grignon, de Ste Adèle et du révérend frère Liguori de La Trappe.

Cinq ans plus tard, en 1913, elle en comptait 66, dont dix-huit d’entre eux étaient des religieux, dont quatre Jésuites et cinq Trappistes. Il y avait en plus le célèbre Abbé Huard, le premier Entomologiste Provincial et fondateur de la revue scientifique Le Naturaliste Canadien et également le célèbre Frère Marie-Victorin, fondateur du Jardin Botanique de Montréal et auteur de la Flore Laurentienne. Au Conseil d’administration, parmi les sept directeurs, cinq étaient des religieux. À la lecture des articles publiés dans les Rapports annuels, on comprend que ces illustres religieux étaient des savants qui ont fourni une précieuse contribution au développement de la SPPQ. La Société rayonnait déjà par ses membres hors Québec, il y en avait dix de l’Ontario, trois de Nouvelle-Écosse, deux de la Saskatchewan, un du Manitoba, un du Nouveau Brunswick et un du Maine.

Le Professeur Lochhead, fondateur de la SPPQ, en assuma la présidence pendant seize ans. Son premier successeur dans cette fonction fut le révérend Père Léopold. À part d’être un Trappiste reconnu, il était un homme de sciences, un grand éducateur et un amateur d’insectes et de fleurs. L’Université de Montréal l’a reconnu Docteur es Sciences Agricoles.

Le Dr Georges Maheu, premier président à la fois civil et francophone de la SPPQ de 1930 à 1932, prononça une allocution à l’occasion du 40e anniversaire de la Société en 1948.Deux brefs extraits : « Force est de constater que je me trouve bel et bien l’unique spécimen de la faune des anciens présidents de langue française »; puis se rappelant une réunion de 1916, il enchaîna « L’élément français y était en petite minorité et les délibérations se faisaient dans la langue de la majorité ». C’est vers 1934 que la Société est devenue en majorité francophone.

Une nouvelle revue

Au début, la SPPQ publiait un rapport annuel qui présentait les résultats des travaux de recherche de ses membres. Ce rapport n’était pas considéré par la majorité des membres comme un véhicule pertinent pour la publication des résultats de leur recherche, en grande partie à cause du long délai de publication. En conséquence, ils ont réclamé vigoureusement, pour leurs résultats de recherche, un véhicule différent qui pourrait être publié plus qu’une fois par année.

Les administrateurs de la Société ont réagi et décidé de publier une revue à caractère scientifique. Un comité de rédaction a été formé, et une revue, appelée Phytoprotection, voit le jour en juin 1963. Le premier numéro de cette revue était étiqueté « Volume 44 », pour indiquer qu’il s’inscrivait à la suite des rapports annuels dont le dernier était le numéro 43.

Phytoprotection publie, trois fois par année, en français ou en anglais, des articles scientifiques originaux traitant de tous les aspects de la protection des plantes dont la phytopathologie, l’entomologie, la nématologie, la zoologie, la malherbologie, et les facteurs abiotiques liés au bien être des végétaux. La revue compte également une section de notes historiques sur la protection des plantes et des profils de scientifiques qui ont contribué, ou qui contribuent actuellement, à élargir les connaissances en sciences liées à la protection des plantes. Au début, la revue comportait une section de nouvelles pouvant intéresser ses membres. Phytoprotection est une revue scientifique internationale, une revue dont les articles sont signalés ou résumés dans les meilleurs bulletins bibliographiques, de sorte que l’ensemble du monde scientifique peut prendre connaissance de ce qu’elle publie.

Accréditation de la Société

Bien qu’elle comptait 76 ans d’existence, la SPPQ n’était pas légalement constituée en une entité du Québec. À ses débuts, la constitution en société était perçue comme une subtilité juridique inutile, mais avec l’augmentation de la fréquence des poursuites, même pour des infractions ou des irrégularités très mineures, il devint désirable que la Société ait une structure juridique plus officielle. Immédiatement après l’Assemblée annuelle de 1984, le Dr Gilbert Banville, alors président de la Société, a sollicité du conseil d’administration l’autorisation de prendre les dispositions nécessaires conduisant à la constitution en société de la SPPQ. Les lettres patentes ont été obtenues quelques mois plus tard.

Les femmes et la SPPQ

Bien que les femmes aient toujours été les bienvenues dans la nouvelle Société, ce n’est qu’en 1916 qu’elles en sont devenues membres. Cette année là, deux jeunes femmes, Margaret Newton, native de Montréal, et Pearl C. Stanford, originaire de la Nouvelle Écosse, à l’incitation du professeur Lochhead, sont devenues les 7 premiers membres féminins de la SPPQ. Depuis, bon nombre de femmes en ont été des membres actifs et plusieurs d’entre elles y ont occupé des postes administratifs et ont été par ailleurs beaucoup plus actives que la majorité des hommes. Il est peu probable que Lochhead ait jamais imaginé que la SPPQ serait encore très dynamique après 100 ans, ni qu’une femme, titulaire d’un doctorat en sciences, Dre Valérie Gravel, en serait la présidente durant l’année du centenaire.

Création d’un logo

Comme bon nombre d’organisations possèdent un symbole ou un logo particulier qui fait partie de leur identité, l’administration de la SPPQ a décidé qu’elle devait posséder un logo ou un symbole distinctif, qui serait instantanément associé à la SPPQ tout en étant suffisamment simple pour être reconnu même en étant très petit. Le dessin qui en est résulté a été adopté par les membres lors de l’assemblée annuelle qui s’est tenue à Hull en 1987.

Le logo officiel représente symboliquement une plante munie d’une racine à l’une de ses extrémités et de deux feuilles à l’autre. Le corps de la plante s’enroule en un cercle protecteur ouvert. Le cercle est ouvert à la base pour indiquer que la Société est toujours ouverte aux nouvelles idées et aux nouveaux membres. Les deux feuilles, de taille inégale, représentent la diversité des espèces végétales ainsi que des disciplines vouées à la protection des plantes et traduisent également la dualité des membres de la Société. Pour montrer qu’il s’agit d’une Société dont le siège social est au Québec, le logo a l’aspect global de la lettre Q, pour Québec.

Depuis sa fondation, quatre-vingt-dix-neuf présidents se sont succédés et les vingt huit premières réunions annuelles se sont déroulées au Collège Macdonald de l’Université McGill. Par la suite, ces réunions annuelles se tenaient en alternance dans différentes villes du Québec. Le Professeur Lochhead, président fondateur de la SPPQ, a été élu président à chacune des seize premières réunions annuelles. Cependant, graduellement, la présidence fut occupée par des personnes différentes.

Autres publications de la SPPQ

À part la revue Phytoprotection qui est la seule revue scientifique au monde couvrant toutes les disciplines de la protection des plantes où il est possible de publier en français et en anglais, la SPPQ a édité deux publications majeures, l’une regroupant les noms des insectes et l’autre, regroupant les noms des maladies des plantes. Ces ouvrages sont des références de première importance pour tous les scientifiques dans le domaine de la protection des plantes, les enseignants et les personnes spécialisées dans la traduction.

NOMS FRANÇAIS DES INSECTES AU CANADA ET NOMS LATINS ET ANGLAIS CORRESPONDANTS :
– Première édition en 1947 : 66 pages – Cinquième édition en 1985 : 299 pages.

NOMS DES MALADIES DES PLANTES AU CANADA :
– Première édition en 1961 : 169 pages – Quatrième édition en 2003 : 340 pages

Véritable bible de la nomenclature des maladies des plantes au Canada, cette publication s’adresse aux personnes qui désirent savoir les noms exacts des maladies, que ce soit en français ou en anglais. Elle est le fruit du travail de compilation de plusieurs dizaines de phytopathologistes au cours des années. Elle contient un index multilingue de plus de 550 plantes-hôtes.